Un mois de juin record malgré l'effet de La Niña
Alors que certaines régions du monde ont cuit sous une chaleur extrême en mai, les températures au Canada sont restées relativement fraîches... jusqu'à ce que juin batte les records de chaleur.
La Niña, un régulateur de température?
Selon les principales agences climatiques du monde, le mois de mai dernier s'est classé parmi les 10 mois de mai les plus chauds des annales. Dans le dernier rapport sur le climat mondial de la NOAA, le mois s'est classé au neuvième rang des plus chauds, 0,77 °C au-dessus de la moyenne du XXe siècle (14,8 °C).
La température moyenne de chaque mois de mai depuis 1880. Mai 2022 est un des plus frais des dernières années, mais il est quand même parmi les 10 plus chauds (source : NOAA NCEI)
Alors que des vagues de chaleur extrême ont été ressenties dans d'autres parties du monde, la ténacité de La Niña a maintenu les températures canadiennes plus basses en 2022.
« C'était le mois de mai le plus frais depuis 2013, mais il a tout de même marqué le 46e mois de mai consécutif et le 449e mois consécutif avec des températures supérieures à la moyenne du 20e siècle, nominalement du moins », indique la NOAA dans le rapport. « Les 10 mois de mai les plus chauds ont tous eu lieu de 2010 à aujourd'hui ».
L'Agence météorologique japonaise a classé le mois de mai comme le huitième plus chaud; selon le décompte de la NASA il était le sixième plus chaud (à égalité avec 2018); et le Copernicus Climate Change Service d'Europe l'a classé ex aequo (avec 2018 et 2021) comme le cinquième plus chaud.
Pour le mois de juin, les choses s'empirent : NASA le classe le plus chaud ex aequo avec juin 2020, alors que Copernicus et l'Agence météorologique japonaise le classent troisième.
Plusieurs épisodes de chaleur extrême ont été enregistrés dans le monde en mai et en juin. Les températures ont grimpé en flèche en Inde et au Pakistan, où elles ont dépassé 51 °C, et l'Europe a souffert d'une vague de chaleur record. La chaleur a également été ressentie dans le sud et l'est des États-Unis, et a même touché le sud de l'Ontario et le Québec. Malgré tout, c'est l'influence rafraîchissante de La Niña qui a empêché la température mondiale d'atteindre des niveaux encore plus élevés en mai.
Un refroidissement sur la planète
L'un des principaux facteurs d'influence du système climatique actuel est La Niña. Elle se manifeste par des températures plus froides que la normale dans l'océan Pacifique équatorial, associées à un fort flux de vent d'ouest allant de l'Amérique du Sud à l'Asie du Sud-Est.
Ce phénomène a généralement un effet de refroidissement sur la planète, car une aussi grande surface d'eau plus froide absorbe une grande quantité de chaleur de l'atmosphère. Le changement de régime météorologique qui en résulte a une influence particulièrement forte sur le Canada et les États-Unis.
En contraste, El Niño a entraîné le phénomène contraire en 2015-2016. On a alors connu des températures extrêmement chaudes - 2016 détient encore le record. La chaleur dégagée par un El Niño plus modéré en 2019 a presque battu le record, et on est passé encore plus proche lors de la transition d'El Niño à La Niña en 2020.
Nous sommes actuellement au milieu d'un phénomène La Niña plus long que la moyenne. Cette tendance s'est établie dès septembre 2020 et a persisté jusqu'en 2021, avant de s'affaiblir légèrement au début de cette année. Depuis lors, elle s'est à nouveau renforcée et il semble qu'elle persistera au moins tout au long de l'été. Selon l'Organisation météorologique mondiale (OMM), les dernières évaluations indiquent que La Niña pourrait s'obstiner jusqu'en 2023. Ce ne serait que la troisième fois que cela se produit depuis les 72 dernières années. Mais lorsqu'elle fera place à El Niño, on peut alors s’attendre à des températures qui pourraient dépasser celles de 2016.
Risque d’ouragans plus fort
D'après les données climatiques de la NOAA, les mois de janvier à mai de cette année se sont classés au sixième rang des mois les plus chauds jamais enregistrés dans le monde. Cela reflète le même schéma de points chauds, modéré par l'influence de cette eau fraîche dans le Pacifique équatorial. Toutefois, en ce qui concerne spécifiquement l'Amérique du Nord, cette période de cinq mois a été nettement plus fraîche. Ce n'est que la 42e séquence de janvier à mai la plus chaude des 112 dernières années.
La majeure partie du froid s'étant concentrée sur le Canada, par rapport à la normale, notre pays a été l'un des endroits les plus froids de la planète en 2022. Le refroidissement dû à La Niña ne devrait cependant pas durer au Canada et aux États-Unis. Pendant l'été septentrional, l'influence de ce phénomène tend à s'éloigner de l'Amérique du Nord pour affecter les régimes climatiques d'autres régions du monde. Le seul impact majeur qui reste pour nous est un changement des conditions dans l'Atlantique, qui favorise généralement le développement d'ouragans plus nombreux et potentiellement plus forts.
Adapté d'articles de Scott Sutherland de TWN sur les tendances des mois de mai et juin.
Image bannière : graphique des températures mondiales contre la moyenne de 1980 à 2015, selon les données de la NASA juin 2022 est ex aequo au troisième rang des mois de juin les plus chauds depuis 1880 (source : NASA GISS)