Comment savoir si la météo extrême est causée par le réchauffement climatique?
Une nouvelle analyse fournit une image plus claire du lien entre certains événements météorologiques extrêmes et les changements climatiques d'origine humaine.
En 2022, de nombreux cas de météo extrêmes
Une grande partie de l'Europe et du Royaume-Uni a été touchée cet été par une vague de chaleur sans précédent dans l'histoire. Pour la première fois depuis que les températures ont commencé à être relevées, le Royaume-Uni a atteint un maximum de plus de 40 °C. Dans près de 50 stations météorologiques du Royaume-Uni, les records de température ont localement été battus.
Cet événement météorologique inédit survient après la dangereuse vague de chaleur qui a frappé l'Inde et le Pakistan en mars et avril, avec des températures étouffantes qui ont mis en danger la santé humaine, provoqué des pénuries d'eau et endommagé les cultures. Des millions de personnes ont dû subir des températures proches de celles d'un sauna, qui ont atteint 50 °C pendant des semaines. Près de 100 personnes sont mortes.
La rareté et le caractère extrême de ces vagues de chaleur amènent les spécialistes du climat à se demander si ces phénomènes peuvent être réellement liés au changement climatique. Les études sur le lien de causalité entre les événements météorologiques et les changements climatiques sont en plein essor. « Ce que les scientifiques de cette section météorologique essaient de faire, c'est de calculer dans quelle mesure le changement climatique a eu une influence sur un événement particulier », a déclaré Rodrigo Bombardi, directeur des sciences du climat chez Weather Source, à The Weather Network.
Depuis le début du siècle, les chercheurs spécialisés dans l'attribution étudient et commencent à confirmer le lien entre les activités humaines et l'augmentation des phénomènes météorologiques extrêmes comme les températures intenses, les sécheresses ou les précipitations.
Un lien irréfutable entre le réchauffement climatique et les conditions météorologiques
Un rapport de Carbon Brief a analysé plus de 400 études d'attribution d'événements extrêmes évaluées par des experts et portant sur des phénomènes météorologiques allant des typhons aux incendies de forêt. Il en ressort « des preuves de plus en plus nombreuses que l'activité humaine augmente le risque de certains types de phénomènes météorologiques extrêmes, en particulier ceux liés à la chaleur ».
L'analyse a révélé que sur les 504 phénomènes météorologiques extrêmes étudiés, 71 % ont été jugés plus probables ou plus graves en raison du changement climatique. Sur les 152 épisodes de chaleur étudiés, le changement climatique a accru la probabilité ou la gravité de 93 % d'entre eux. Douze événements météorologiques extrêmes distincts ont été considérés comme impossibles sans les changements apportés par l'homme au climat mondial. Les vagues de chaleur qui ont frappé le Royaume-Uni, l'Inde et le Pakistan constituent de véritables événements graves.
Selon Chris Scott, responsable de la météorologie à The Weather Network, « lorsque nous parlons de vagues de chaleur, il est facile de faire le lien avec les changements climatiques. L'ampleur de l'événement, sa gravité et sa fréquence, nous pouvons dire que le réchauffement climatique rend ces événements plus probables. »
L'organisme de recherche World Weather Attribution , s'appuyant sur une analyse examinée par des confrères, a constaté qu'il aurait été « extrêmement improbable » que le Royaume-Uni atteigne des températures de 40 °C sans changement climatique d'origine humaine.
WWA affirme aussi dans une analyse que le lien entre la vague de chaleur indienne et le changement climatique est irréfutable. Ils ont combiné les observations rassemblées à partir de 20 modèles climatiques pour déterminer que « le changement climatique d'origine humaine a rendu cette vague de chaleur plus chaude et plus probable. »
Des gens trouvent refuge à l'ombre sous un pont à New Delhi en Inde lors de la canicule le 10 mai 2022 (source : Amarjeet Kumar Singh/ Anadolu Agency/ Getty Images)
Des vagues de chaleur plus fréquentes dans les années à venir
« La probabilité d'un événement comme celui de 2022 a été multipliée par un facteur d'environ 30, selon l'étude. Le même événement aurait été environ 1° C plus frais dans un climat préindustriel. » Une autre étude, produite par le Met Office, a révélé que le changement climatique augmentait la probabilité d'un tel événement d'un facteur de 100. Selon l'analyse, les vagues de chaleur telles que celle qui a touché l'Inde et le Pakistan se produisaient environ une fois tous les 300 ans, mais dans un contexte de réchauffement planétaire, on peut désormais s'attendre à ce qu'elles se produisent tous les 3 ans.
« Ce qui se passe, c'est que les changements climatiques aggravent un peu plus chaque événement, a déclaré M. Bombardi. On peut considérer le changement climatique comme une vague très lente qui se déplace, sur des échelles de temps plus longues que la vie humaine. Et la météo est la haute fréquence qui vient s'ajouter à cette vague lente. »
Ces conditions météorologiques destructrices devenant la nouvelle norme, les analystes ne cesse de voir des records battus au cours des dernières années, avec divers records de tous les temps enregistrés au Royaume-Uni, en Inde et au Pakistan au milieu de ces dernières vagues de chaleur.
L'analyse de WWA a déterminé que « des vagues de chaleur comme celle-ci deviendront encore plus courantes et plus grave ». L'étude du Met Office a constaté que, d'ici la fin du siècle, des phénomènes de chaleur aussi élevés se produiront chaque année. « Je pense que nous pouvons utiliser les calculs d'attribution comme un outil, a déclaré Scott. Lorsque nous pouvons examiner des événements spécifiques qui sont liés à la façon dont nous influençons l'atmosphère, je crois que c'est un élément positif pour nous permettre de comprendre l'impact que nous avons. »
« Le seul signal clair, a-t-il ajouté, c'est que nous sommes plus exposés et plus vulnérables que nous ne l'avons jamais été. »
D'après un texte de Neil Osborne et M.A. Jacquemain, journalistes à The Weather Network.
Image bannière : le réservoir Woodhead à Glossop, Angleterre, le 21 juillet dernier alors que son niveau était à 62 % de sa capacité habituelle (source : Christopher Furlong/ Getty Images)