Le Québec a un appétit croissant pour les voitures énergivores

Le constat est clair : si le Québec continue dans cette voie, tout indique que la province ratera ses prochains objectifs climatiques. C'est, du moins, ce que suggère l'État de l'énergie au Québec 2021.


L’État de l’énergie au Québec 2021, mis sur pied par la Chaire de recherche en gestion du secteur de l’énergie de HEC Montréal, vise à rassembler les données les plus récentes en matière d’énergie, et de permettre aux Québécois de se familiariser avec ce système complexe.

Une pandémie qui a tout changé... temporairement

La pandémie de COVID-19 a bouleversé l’ordre établi, et causé un ralentissement économique sans précédent partout dans le monde. Le secteur de l’énergie québécois n’a pas été épargné : la forte baisse des déplacements individuels et l’arrêt presque complet des activités industrielles et économiques ont considérablement diminué la consommation totale d’énergie, tous secteurs confondus.

Comme ces effets sont liés à une crise sanitaire qui, éventuellement, finira par se dissiper, tout indique que ces améliorations ne sont, elles aussi, que temporaires. Si le Québec veut atteindre ses cibles climatiques, il faudra redoubler d’efforts. Pour le moment, si la tendance se maintient, tout indique que la province ratera ses objectifs.

Un des secteurs névralgiques en matière d’émissions de gaz à effet de serre au Québec (et au Canada, par ailleurs) est le transport, à la fois individuel et de marchandises.

Depuis 2014, les émissions ont globalement cessé de décroître au Québec. Cette tendance est notamment liée à la popularité de véhicules à essence de plus en plus gros et à leur consommation en carburant. «De 1995 à 2019, les ventes totales de produits pétroliers raffinés (PPR) ont progressé de 10 % [...]». Cette augmentation est propulsée par l’essence, d’après l’État de l’énergie.

Les gros véhicules à essence ont toujours la cote

Si, au départ, on aurait pu penser que les changements climatiques et le ralentissement économique causé par la crise sanitaire auraient pu freiner l’appétit insatiable des Québécois pour les véhicules individuels, les données nous révèlent que c’est loin d’être le cas. Le parc automobile du Québec ne cesse de croître : entre 1990 et 2018, le nombre de véhicules personnels a augmenté de près de 66 %, ce qui représente près de trois fois la hausse démographique de la province. Cette tendance est bien ancrée dans toutes les régions du Québec et ce, depuis de nombreuses années.

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Les camions légers (incluant les véhicules utilitaires sport, les minifourgonnettes et les camionnettes) ont la cote. Une hausse de 256 % des ventes de ce type de véhicules a été observée entre 1990 et 2018. Les VUS et compagnie se retrouvent en grand nombre sur les routes du Québec, remplaçant peu à peu les voitures plus petites (qui ont connu une baisse d’environ 36 % d’unités vendues entre 2015 et 2019).

Parmi les véhicules qui connaissent une baisse de popularité dans les ménages de la province, on peut compter les véhicules électriques. Malgré les nombreux incitatifs gouvernementaux, les véhicules électriques ne correspondent qu’à une part marginale du parc automobile au Québec : ils ne sont qu’un maigre 6 % du marché en 2019, même si les ventes augmentent depuis les huit dernières années. «Ces tendances sont contraires à l’atteinte des cibles de réduction des émissions de GES», peut-on lire dans le rapport.

La route est donc encore longue. «Dans son plan d’électrification des transports, le gouvernement du Québec vise 100 000 véhicules électriques sur les routes en 2020, incluant les véhicules hybrides rechargeables. À l’aube de 2020, il restait donc 15 % de la cible à atteindre.»

Mentionnons toutefois que l’efficacité énergétique des véhicules, tout style confondu, s’est grandement améliorée avec les années. Une voiture consomme aujourd’hui un tiers de moins de carburant qu’en 1990.

«Pour atteindre la carboneutralité en 2050, comme le PEV [Plan pour une économie verte] l’indique, il faudra radicalement modifier nos habitudes de transport et de consommation, ainsi que la production industrielle. L’utilisation de mécanismes d’écofiscalité et l’occupation du territoire devront être revues pour optimiser les déplacements, la mobilité devra être plus efficace, les bâtiments beaucoup moins énergivores et l’industrie devra éliminer à terme les émissions dans ses procédés. C’est tout un défi pour les 30 prochaines années pour lequel nous ne sommes ni encore prêts, ni encore bien conscients de l’ampleur», peut-on lire dans le document.


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