COP 27: un bilan gris pour le Canada
À la conclusion des négociations à la COP 27, les résultats sont mitigés pour les pays les plus durement touchés par les changements climatiques, et le Canada se démarque comme un allié des pétrolières.
Depuis déjà plusieurs années, le Canada est pointé du doigt lors des réunions annuelles de négociations internationales dans la lutte aux changements climatiques. Nous ne sommes pas vus par la planète comme un pays de grands espaces verts, mais plutôt comme un grand producteur de pétrole.
Un rapport publié pendant la COP 27, l’Indice de performance dans la lutte aux changements climatiques, révèle que sur 63 pays et entités gouvernementales, le Canada se classe au 58e rang mondial. Selon cet indice, les deux plus grandes économies mondiales, soit les États-Unis et la Chine, ont obtenu de meilleurs résultats que nous. Cependant le Canada n’est pas seul. Parmi tous les pays qui composent le G20, 12 ont aussi reçu une très mauvaise note.
Le Canada au 58e rang des pires cancres en matière de climat dans 4 catégories : émission de GES, énergie renouvelable, consommation énergétique, et politiques climatiques. (Source : CCPI Germanwatch)
Est-ce que l’image du Canada est redorée en conclusion de la COP 27? Tout au long de la conférence, la présence du lobby du pétrole et des sables bitumineux a été notée au pavillon canadien, ou elle a fait l’objet de manifestations. Les pétrolières étaient bien représentées à la COP 27 - on a compté 636 représentants parmi les délégations, plus que l’an dernier à Glasgow.
Mais le Canada et la communauté internationale ont quand même fait quelques progrès durant ces négociations sur le plan de la finance climatique, sinon de la réduction des émissions.
Réduction des émissions de GES
Les nouvelles cibles déposées par le Canada sont ambitieuses. Le pays dit vouloir réduire ses émissions de 40 % d’ici 2030 et de devenir net zéro d’ici 2050. Malheureusement, pour respecter l’accord de Paris et limiter le réchauffement global à 1,5 C, ce n’est pas assez. Surtout que dans ce plan, le Canada prévoit augmenter sa production pétrolière de 5 % d’ici 2030.
Le niveau d’émissions ciblé par le Canada d’ici 2030 et sa trajectoire actuelle comparés au niveau requis pour respecter les objectifs de l’Accord de Paris. (Source: CCPI Germanwatch)
L’an dernier, à Glasgow, le premier ministre Justin Trudeau avait pourtant annoncé qu’il imposerait un plafond aux énergies fossiles. Il y a, quand même, eu cette année une Déclaration commune des importateurs et des exportateurs d'énergie sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Celle-ci a été signée par le Canada, les États-Unis, la Grande-Bretagne, l’Union européenne, le Japon, Singapour et la Norvège. Cette dernière est aussi un grand producteur de gaz et de pétrole, mais, contrairement au Canada, elle investit tous les profits de cette industrie dans des projets de développement durable.
À ce sujet, le Groupe d'experts de haut-niveau sur les engagements de zéro émission nette des entités non-étatiques de l’ONU (en gros, des experts sur l’écoblanchiment par les banques et entreprises, mené par l’ancienne ministre canadienne de l'Environnement et du Changement climatique Catherine McKenna) a publié des recommandations détaillées pour veiller au respect des engagements sur la réduction à zéro des émissions.
Le Canada a aussi proposé un Défi mondial sur la tarification du carbone, invitant les autres pays à adopter des politiques pour tarifier la pollution. Cependant, l’Inde avait déclaré qu’elle souhaitait qu’un énoncé concernant l’élimination progressive des énergies fossiles soit ajouté à la déclaration finale, qui doit être approuvée par tous les pays. Au terme des rencontres, cette mention ne figurait pas dans la déclaration finale.
Finance climatique
Les enjeux étaient grands pour cette COP 27. Les pays responsables de 80 % des émissions mondiales, comme le Canada, avaient promis, il y a plusieurs années, de dédommager les pays en développement, qui sont les plus vulnérables aux changements climatiques. La promesse de cent milliards de dollars par an pour aider ces pays a été mise sur la table en 2009, mais jamais l’objectif n’a été atteint.
Cette année, le Canada a répété sa promesse dans la Déclaration nationale du Canada à la COP 27 : «Ensemble, nous nous sommes engagés à mobiliser 100 milliards de dollars pour le financement de l’action climatique d’ici 2023. Le Canada honore son engagement de 5,3 milliards de dollars dans le financement de la lutte contre les changements climatiques.»
Un autre mécanisme de financement, le Global Shield a été adopté par tous les pays du G7 comme une sorte d’assurance contre les pires impacts des changements climatiques. Dans le plan de financement climatique du Canada, 7 millions de dollars sont octroyés au bouclier ainsi que 5 millions pour soutenir le réseau d’accès au financement climatique, parmi des initiatives totalisant 24 millions pour répondre aux besoins des pays en développement.
Les négociations sur cet enjeu, en plus d’une enveloppe additionnelle pour les pertes et préjudices, ont été au cœur des discussions à la COP 27. Sur ce plan, le Canada fait meilleure figure, car nous avons bonifié le montant que nous déposons chaque année dans cette cagnotte et nous avons encouragé plusieurs autres pays à faire de même.
Après de longs débats, les parties se sont mises d’accord pour créer un fond pour compenser les pays vulnérables pour les pertes et dommages encourus suite aux catastrophes causées par les changements climatiques. Les détails de ce mécanisme restent toujours à définir, mais c’est un pas de franchi.
Cependant, comme chaque année, à la fin des COP, on constate que nous avançons, mais pas assez vite. Les fonds pour aider les pays en développement sont difficiles à amasser et les objectifs de réductions des pays ne sont pas assez ambitieux pour respecter l’Accord de Paris.
Les yeux se tournent maintenant vers la COP15 sur la biodiversité qui se tiendra à Montréal du 7 au 19 décembre prochain. Plusieurs espèrent qu’on y signera un accord sur la sauvegarde de la biodiversité mondiale aussi important que l'Accord de Paris pour le climat.
Image bannière: la porte d'entrée de la COP 27 en Égypte (Source: Wikimedia)