Encore un accident qui fait avancer la science
Comme c’est souvent le cas, une avancée scientifique a vu le jour alors qu’une biologiste s’adonnait à une tâche bénigne. Federica Bertocchini est chercheuse au centre biologique Margarita Salas de Madrid. Apicultrice amateur, elle vient de publier les résultats de sa recherche, inspirée d’une larve qu’elle a trouvée en nettoyant des ruches d’abeilles. L’étude conclut que deux enzymes contenues dans la salive des larves sont capables de dissoudre le plastique.
En nettoyant les ruches, madame Bertocchini a remarqué que les alvéoles à l’intérieur avaient été envahies par des larves d’un papillon de nuit appelé Galleria mellonella. Celles-ci raffolent de la cire d’abeille. Après les avoir retirées, elle les a déposées dans un sac de plastique. Au moment de reprendre le sac, elle a remarqué que celui-ci était troué à plusieurs endroits. Elle s’est alors demandé si les larves étaient responsables de ces perforations. Avaient-elles mangé le plastique ou était-ce une réaction chimique? En faisant des tests en laboratoire, elle découvre que le polyéthylène, qui compose le sac, a été oxydé.
La découverte est importante. On savait déjà que pour dégrader le polyéthylène, la chaîne moléculaire doit être injectée de molécules d’oxygène, mais le procédé requiert une source d’énergie. On doit faire chauffer la chaîne moléculaire pour que s’y infiltre l’oxygène qui permettra la biodégradation du polyéthylène. Lorsque la chaîne se brise en petits morceaux, il est plus facile qu’elle soit métabolisée par des microorganismes comme des bactéries ou des champignons microscopiques.
Grâce aux travaux de la chercheuse, on peut maintenant injecter l’oxygène dans la chaîne moléculaire du polyéthylène sans utiliser une source d’énergie, car la réaction chimique se fait naturellement en seulement quelques heures à la température ambiante. Le recyclage chimique décompose le polyéthylène sur le plan moléculaire, contrairement au recyclage mécanique utilisé normalement. Ce dernier broie en petits morceaux le plastique, qui est par la suite fondu pour faire de nouveaux objets. Cependant, ce procédé permet difficilement d’en faire des objets de qualités.
Environ 30 % des plastiques produits chaque année sont des polymères appelés polyéthylène. Ils servent, entre autres, à la fabrication des bouteilles d’eau vendues partout sur la planète. C'est un polymère très résistant qui se dégrade difficilement. Selon le National Geographic, 5000 milliards de morceaux de plastiques flottent déjà dans nos océans. Le plastique est régulièrement consommé par la faune aquatique comme terrestre. La décomposition de tout ce plastique est essentielle si on veut garder l’écosystème planétaire en santé. Il y a aussi un autre avantage à cette décomposition. Elle nous donne accès à une grande quantité de carbone sans avoir à creuser le sol. Celui-ci peut servir à fabriquer une foule d'objets qu’on utilise au quotidien comme des vêtements, des souliers, des lunettes ou même des sacs. Nous produisons annuellement 460 millions de tonnes de plastique.