5000 ans d'histoire sous nos pieds
Je n’y avais jamais mis les pieds. En fait, je ne connaissais pas. Mais à voir la quantité de monde qui se promène à gauche et à droite, l’île Saint-Bernard, à Châteauguay, est pas mal populaire. Le directeur général, Luc L’Écuyer, m’a fait faire le tour du propriétaire. Gros coup de cœur pour l’endroit.
Premièrement, parce que j’ai l'impression que le temps s’arrête. Que l’on vient ici pour pratiquer abondamment l’art d’être oisif. Ça fait du bien.
Et ça, Luc l’a compris, ça fait longtemps!
« Il n'y a plus de stress, le temps est plus lent. J’ai toujours rêvé de travailler ici. Ben mosus ça fait plus de 25 ans que je suis le directeur. Mon grand rêve s’est réalisé. » - Luc L’Écuyer, directeur général d'Héritage Saint-Bernard
L’île Saint-Bernard est aussi appelée le refuge faunique Marguerite d’Youville. Parce qu’à l’époque, il faut remonter en 1765, Marguerite d'Youville fonde les Sœurs Grises de Montréal. Elle fait l’acquisition de la seigneurie de Châteauguay et, durant 200 ans, ces religieuses habitent l’île et ont pour mission de protéger la vie sous toutes ses formes. Elles sont les gardiennes de ce milieu naturel qui s’étend sur des centaines d'hectares.
En creusant encore plus loin dans le passé, j’apprends que les lieux ont été le point de rencontre entre les Autochtones et les Européens. Ça fait plus de 5 000 ans que des humains passent sur l'île Saint-Bernard. L'endroit a été un lieu stratégique, au confluent du lac Saint-Louis et de la rivière Châteauguay, pour la guerre, pour la paix, pour l'échange, pour le commerce et pour la mort aussi. Il y a beaucoup de gens qui sont enterrés sous nos pieds.
« On a retrouvé des artefacts qui datent de plus de 4 000 ans! Il y a un moulin qui date de 1686. C’est l'un des plus vieux moulins à vent en Amérique du Nord, encore debout. Et bien sûr, il y a aussi le cimetière des Soeurs Grises. »
Avant de devenir directeur général, Luc L'Écuyer venait déjà sur l’île, muni d'une pelle. Il a fait partie du Commando des planteux.
« Dans les années 80, mes amis et moi, on croyait que pour stabiliser les berges il fallait planter des arbres. Fait que, au printemps, on prenait des boutures et on les replantait dans la boue puis ça repoussait. Alors, à chaque année, c'était la fête. On plantait des arbres envers et contre tous parce qu'on n'était pas toujours les bienvenus. Mais on le faisait pareil parce qu’on savait que c’était important. »
Selon lui, l’arbre est la meilleure machine qui n’a jamais été inventée pour réduire les gaz à effet de serre. C’est l’allié qu’il nous faut pour déjouer les changements climatiques.
« Aujourd’hui ce n’est pas la nature qui compte, c’est l’argent. Mais là, la nature est en train de nous rappeler à l'ordre. Il faut laisser les arbres produire de la photosynthèse. Planter des arbres et protéger des endroits comme celui-là, c’est comme ça qu’il faut penser astheure. »
En marchant dans les sentiers, je ne peux pas faire autrement que de revenir à l’essentiel. La vie sous toutes ses formes est partout où je regarde. Et c’est beau. Être ici est une thérapie en soi.
« L'humain a absolument besoin de contact avec la nature, c’est viscéral. J'ai des témoignages de gens qui ont eu des moments difficiles, des cancers, des gens qui ont perdu leurs parents. Ils viennent ici pour faire un peu leur deuil. Et ça leur apporte beaucoup. Ça calme énormément d'être dans la nature. On a besoin de ça. »
Conclusion, aller à l'île-Saint-Bernard, c’est faire d’une pierre deux coups. De un, on prend du temps pour soi. Et avec la vie que l’on mène, on n’en a jamais de trop. De deux, on marche dans les pas de notre histoire, qui est loin d’être banale!