Un épais brouillard empoisonne et tue des milliers de personnes
Pour les Londoniens, le brouillard n’a rien d'exceptionnel. C’est d’ailleurs la caractéristique principale de leur climat. Le matin du 5 décembre 1952, un épais brouillard s’était installé sur la capitale britannique. Lorsque celui-ci se dissipa le 9 décembre, 4000 personnes ont trouvé la mort par empoisonnement. Pendant longtemps, les scientifiques ont eu du mal à expliquer le contenu meurtrier de ce brouillard. Ce n’est que tout récemment que l’étude de la formation de smog en Chine a donné aux scientifiques la réponse à leurs questions.
Tous les éléments étaient réunis pour une catastrophe
La plupart du temps, l’air en altitude est plus froid que celui qui se trouve au sol. C’est ce qui permet à l’air plus chaud, près du sol, de s’élever et de se refroidir en altitude. Il arrive parfois que l’air en altitude soit plus chaud que celui au sol. Ce phénomène est appelé “inversion”. Lors d’une inversion, l’air froid au sol ne s’élève pas, mais reste bien campé par terre. L’anticyclone qui est venu s’installer sur Londres le 4 décembre a fait grandement chuter les températures. L’air au sol s’est refroidi et est devenu stagnant. Pendant cinq jours, les vents inexistants à cause de l’anticyclone n’ont pas pu recycler l’air de la ville.
On est au début décembre et les Londoniens, qui subissent cette vague de froid, vont chauffer leur maison. Le chauffage de l’époque se fait surtout au charbon. Combiné aux émanations venant des usines voisines et des centrales de production d’électricité, qui elles aussi fonctionnent au charbon, l’air se remplit rapidement de polluants issus de la combustion de ce charbon. De plus, le charbon utilisé pour le chauffage des maisons est de moindre qualité et produit plus d’émanations. Afin de réduire la pollution engendrée par celui-ci, quatre ans plus tard, le Parlement britannique va voter le “clean air act” .
Une réaction chimique insoupçonnée
L’étude du smog en Chine, en octobre 2016, va démontrer comment cette pollution s’est transformée en acide sulfurique, un puissant poison. Les combustibles fossiles, comme le charbon, émettent lorsqu’on les brûle de nombreux gaz. Un de ceux-ci est le dioxyde de soufre (SO2). Quand il entre en contact avec l’oxygène (O) contenu dans l’air que nous respirons, il se transforme en trioxyde de soufre (SO3). C’est ce trioxyde de soufre qui, quand il côtoie les molécules d’eau (H2O), devient de l’acide sulfurique (H2SO4).
C’est cette même réaction chimique qui était responsable des pluies acides qui ont grandement affecté les forêts québécoises dans les années 80. Il est facile de comprendre la réaction entre les émissions, émises lors de la combustion du charbon, et l’oxygène contenu dans l’air. Mais d'où vient la molécule d’eau ? En fait, il s’agit de la vapeur d’eau. Dans le cas des pluies acides, la vapeur d’eau compose en grande partie le nuage. C’est là que va se produire la réaction chimique. Quand ce nuage, en provenance des régions très industrialisées des Grands Lacs, arrive au Québec, les pluies qu’il déverse sont acides. Dans le cas du brouillard de Londres, il faut savoir que le brouillard, c’est un nuage qui repose sur le sol. C’est donc la même réaction, mais au niveau du sol, là où les gens vivent et respirent.
On estime que cet épisode de brouillard meurtrier à Londres en 1952 est responsable de 12 000 pertes de vie et de l’hospitalisation de plus de 150 000 personnes gravement affectées par l’acide sulfurique ainsi formé, qu’ils ont respiré. Des milliers d’animaux sont également décédés.