Fierté 2021 : quand Alex devient Jessie

Il m'accueille avec un grand sourire. Je suis venue rencontrer, chez lui, mon collègue Alex Verville. Il me fait entrer dans son univers, celui des drag queens. Je m’apprête à découvrir son alter ego, Jessie Précieuse.


Assis dans son salon, Alex m’explique qu’il est drag depuis seulement deux ans. Originaire de Sorel-Tracy, il n’assumait pas complètement son côté extravagant. Mais depuis qu’il a déménagé à Montréal, Alex déploie ses ailes.

« Je ne réussissais pas à m’assumer avant. Cette partie de moi qui aime se maquiller, se coiffer, être extravagante, a toujours été là, mais je n’étais pas capable de l'extérioriser, j'étais trop géné ».

  • Alex Verville

Du plus loin qu’il se souvienne, Alex a toujours eu un faible pour les trucs plus « féminins ». Enfant, il allait en cachette fouiner dans la trousse de maquillage de sa maman, pour voir les couleurs, les paillettes, les pinceaux et … manger ses rouges à lèvres !

« Je n’ai aucune idée du pourquoi je faisais ça. Mais l’odeur m’attirait. Ça sentait la vanille, le chocolat. Je me souviens que mes marques préférées étaient celles de Lise Watier et MAC. », m'explique-t-il.

Il n’y a pas eu d’élément déclencheur, comme tel. Il me raconte que souvent il se transformait à la maison, juste pour le plaisir. Et puis un jour, il a eu le goût de s’afficher au grand jour. L’occasion parfaite s’est présentée lors d’un party d’Halloween. Depuis, Alex ne compte plus le nombre de fois où il est sorti de chez lui, en drag. Il s’assume et ose même faire des spectacles.

« C'est à ce moment-là que j’ai senti qu’en laissant vivre mon personnage, Jessie, j’étais plus authentique envers moi-même et que j’étais plus heureux ».

  • Alex Verville

Alex fait partie de la communauté LGBTQIA+ (un acronyme qui désigne les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, trans, queers, intersexes, asexuels et hétérosexuelle cisgenre). Même s’il a toujours su qu’il était homosexuel, il a tenté de camoufler la vérité. N’osant pas se l’avouer, il a enchaîné les blondes par peur du jugement, par peur du rejet. Jusqu'au jour où sa mère lui a dit : « si quelqu'un te pose la question à savoir si tu es gay, tu as juste à lui répondre « ouin, pis ? » ! » Et voilà ! Il était lancé.

« C'est mon coming out qui a été le plus difficile. Quand je suis sorti du placard, ils avaient peur du regard que les autres pouvaient avoir sur moi. Quand j’ai décidé, 10 ans plus tard, de devenir drag, ils ont respecté mon choix », me raconte-t-il.

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Pour lui se métamorphoser c’est son art, c’est un divertissement, il se donne en spectacle. Jessie, son alter-ego, lui permet d’être ce qu’il ne serait pas normalement, c’est-à-dire aussi glam. Mais entendons-nous, Alex n’a jamais eu la langue dans sa poche, il dit ce qu’il pense, ou presque. Par contre, Jessie n’a pas de filtre. Elle parle fort, elle rit fort et ne se prend pas au sérieux.

« J’ai toujours aimé, dans les films, les personnages au prénom de Jessie. Je me souviens, dans Histoire de jouets, j’avais une fixation sur Jessie la cowgirl. J’aimais son côté survolté, dynamique et enjoué, elle me faisait penser à moi. »

  • Alex Verville

Est-ce qu’être une drag à temps plein lui a déjà passé par la tête ? Il me répond qu’il ne voudrait pas être Jessie tout le temps, mais que son but, en tant que drag, serait plus télévisuel. Il aimerait avoir son émission où il pourrait animer en drag. Pour le kick, pour le show, mais il ne verrait pas son alter ego devenir son mode de vie.

« Je ne me vois pas me maquiller en drag sept jours sur sept. Oui de temps en temps, pour des spectacles, pour mon plaisir. Mais pas, genre, le samedi matin quand j’ai juste le goût de boire mon café devant la télé. », me dit-il en riant.

Un milieu ouvert

Le monde de la drag est un milieu ouvert. Alex me raconte que tout le monde peut devenir drag queen. Il n’y a pas de critères ou d'exigences, c'est un art comme un autre. Il me dit que si tu as du plaisir à faire ce que tu fais, personne ne va te dire que tu n'as pas le droit de le faire. Il croit que, pour être à l’aise, on doit se connaître, s’assumer et ne pas avoir peur d’être qui nous sommes. D’être fière.

« Être drag me permet de vivre tous mes fantasmes de jeunesse, comme être Britney Spears. Ça me permet d’être sur scène et de chanter, danser sans aucune inhibition. »

  • Alex Verville

Avez-vous déjà assisté à un spectacle de drag ? C’est flamboyant, c’est étincelant, c’est bruyant, mais c’est surtout divertissant. On ne fait pas dans la demi-mesure. Et on assiste à plein de choses. De la chanteuse, à la danseuse, à l’acrobate, à celles qui font la split, qui font dans l’humour ou dans la comédie musicale, bref c’est loin d’être beige, je vous le garantis !

Alex me dit que sa seule déception, du fait qu’il est un homme, c’est qu’il trouve que la mode féminine est beaucoup plus belle et beaucoup plus élaborée. Pour lui, se transformer en drag, c’est se faire vraiment plaisir.

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« Par contre, marcher en talons hauts, je trouve ça un peu plus difficile. Disons que les premières fois, j'étais plus gracieuse dans ma tête que dans la vraie vie. J’avais l’air d’une grande girafe », lance-t-il.

Alex change de costume et de couleur d’ombre à paupières selon ses humeurs et son désir d’excentricité. Par contre, l’élément qu’il trouve le moins confortable lors de ses transformations est les faux cils. Mais pour donner un bon show, il faut ce qu’il faut !