Il parcourt plus de 6 700 km et trouve la femme de sa vie
Le mardi 22 octobre 1963, Aldo Gallina, 19 ans, débarque à Montréal. C’est sa sœur qui le convainc de faire le voyage et de venir la rejoindre. Ce séjour allait changer sa vie.
À son arrivée, il ne parle ni français ni anglais. Il parle seulement italien. Habitué à être bercé par le soleil et la mer, il n’était pas vraiment préparé à faire face à la météo québécoise.
« Oh mon dieu! Quand je suis arrivé à Montréal, il faisait froid. Il y avait du grésil et tout ce que j’avais sur le dos était un chandail. Et je me suis dit, qu’est-ce que je fais ici?! (Rire) » - Aldo Gallina
Heureusement, dès le lendemain, avec sa sœur, il se rend rue Saint-Hubert acheter tout ce qu’il faut. Gants, manteau, chapeau et bottes. C’est alors qu’elle lui dit : tu ne vas pas rester à la maison à ne rien faire. Alors 48 heures après avoir déposé sa valise, Aldo commence son nouvel emploi dans une manufacture de chaussures.
« La manufacture était juste à côté de chez nous. J’y allais à pied. Ils m’ont engagé rapidement en sachant que j'étais Italien. Parce que les baraquettes, nous, on connait ça! (Rire) »
Même si Aldo aimait son travail, une autre raison le poussait à rester à Montréal. Vous l’aurez deviné. Une fille. Ah! Ce que l’amour peut faire.
« À la manufacture, à 50 pieds de moi, il y avait une demoiselle. Ah! Mon Dieu qu’elle était belle. Nos yeux se sont croisés et Paf! Ç’a été le coup de foudre! J’ai été ébloui par son regard. Tout le monde me disait : touche pas à cette fille-là, elle ne veut rien savoir de personne. Alors j’ai dit : on verra. »
Aldo Gallina a eu raison. Après l’avoir courtisé pendant quelques mois, après de nombreux rendez-vous, ils se sont finalement mariés, deux ans plus tard.
« Et on a fondé une belle famille. On a eu trois enfants : deux garçons et une fille. Je dis souvent aux enfants, c’est votre mère qui m’a gardé ici. Je dis merci à votre maman parce que sinon, bye bye, je serais parti! Je serais probablement retourné en Italie. Mais je suis encore là. En 2021 on a souligné nos 55 ans de mariage. »
Au début, l’intégration a été difficile surtout à cause de la barrière de la langue. Mais, avec le temps, à force de lire les journaux et d’écouter la radio en français, tout doucement, il s’est intégré.
« J'ai commencé ma carrière dans les souliers. Puis un beau jour, un de mes beaux-frères, qui était camionneur, est venu me voir pour me dire qu'il cherchait des gens pour travailler à l’usine GM de Sainte-Thérèse. J'y ai travaillé 35 ans. Aujourd’hui, je suis à la retraite. Je peux dire que je me suis bien intégré. (Rire) »
Puisque l’intégration passe souvent par la nourriture, Aldo me confie qu’il a un faible pour la poutine et les rondelles d’oignon.
« Mais, naturellement, une bonne assiette de spaghetti aux tomates… Wow! Avec un peu de saucisse. De la saucisse italienne bien sûr! (Rire) Mais les mets italiens, je ne pense pas qu'on a besoin de les mettre en valeur. L’Italie parle d’elle-même. »
Aldo me raconte qu’il se souvient de la tempête du siècle. Celle de 1972 à Montréal.
« À cette époque-là, ça n'existait pas les pneus d'hiver. Quand tu étais pris dans une tempête, c'était ouf! Je suis resté pris trois jours parce que les autoroutes étaient fermées. Quand je suis arrivé à la maison, j'habitais à Saint-Léonard à l’époque, y’avait des gens qui se promenaient dans les rues en skidoos. Et les bancs de neige, les bancs de neige étaient énormes. »
Même s’il est au Québec depuis presque 60 ans, Aldo a fini par apprivoiser l’hiver. Mais le printemps est la saison qu’il préfère.
« Ah mon Dieu. Le printemps, j'adore ça! J'adore parce que je suis un amoureux de la nature. J’aime voir de petites choses pousser dans la terre. Chaque année je plante des haricots, des tomates, des piments et chaque matin je me lève et je regarde mes légumes pousser. J’ai planté aussi des tournesols. C'est une vraie beauté. Et il y a aussi plein d'oiseaux, des colibris et des abeilles qui viennent faire leur tour. Chaque matin ma femme et moi on prend notre café, on observe, on s'amuse. La seule chose qui me fait de la peine c'est qu'on vieillit ! (Rire.) »
Il y a quelques années, Aldo et sa tendre moitié, comme il l’appelle, ont fait un voyage dans la région de Charlevoix. Ils se sont rendus à Tadoussac pour voir les baleines. Les routes, le fleuve, le paysage lui ont rappelé l’Italie.
« Il y a une dizaine d'années, je suis retourné dans mon village natal, Campobasso, en Italie. J’ai revu la maison où j'ai grandi. Ç’a été tout un choc. Mais j’en garde un beau souvenir. Après, nous sommes revenus au Québec. On est revenu chez nous. Notre vie est ici. Notre maison c’est le Québec. Et je l’adore. Je remercie le destin de m'avoir amené jusqu’ici. »
En Italie, Aldo avait la mer. Au Québec, il a découvert la neige. Aujourd’hui il a besoin des deux pour être heureux.
Et comme le chantait Gilles Vigneault : « Mon pays, ce n'est pas un pays, c'est l'hiver. Ma chanson, ce n'est pas ma chanson, c'est ma vie. »
**Suite au décès de M. Aldo Gallina toute l’équipe de MétéoMédia aimerais offrir ses plus sincères condoléances à sa famille. Son épouse Elga, ses enfants Daniele, Silvano et Nancy ainsi qu’à ses petits-enfants, Mégane, Zachary, Clara et Arnaud.