Villes durables après la COVID : l’exemple de Barcelone, la voie de l’avenir ?
Une partie du quartier de l'Eixample à Barcelone. marchello74/Shutterstock
Anupam Nanda, University of Manchester
Des centres-villes auparavant très animés se sont vidés et sont évités au profit de zones suburbaines ou rurales, où la distanciation physique est plus facile à respecter.
Le déploiement des campagnes de vaccination permet d’espérer un certain retour à la normale dans les villes. Toutefois, l’impact de la Covid-19 pourrait perdurer.
La pandémie a permis de constater à quel point les embouteillages, la pollution et le manque d’espaces verts peuvent être dommageables, et notamment comment ces facteurs ont contribué aux malheurs des citadins. Cette période offre l’occasion d’améliorer la vie en ville.
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Barcelone est un bon exemple de la manière dont les zones urbaines peuvent être transformées pour réduire la pollution et accroître l’accès aux espaces verts.
Cette ville d’Espagne a été la première, en 2016, à introduire le concept de superblocs dans le cadre de sa planification urbaine verte. Les superblocs sont des quartiers de neuf pâtés de maisons dont les rues sont réservées aux piétons et aux cyclistes. La circulation automobile est limitée aux routes principales en périphérie de ces superblocs.
Récemment, d’autres plans ont été annoncés pour étendre les zones vertes dans le district Eixample, un quartier central de la ville. Il s’agit d’une expansion majeure des zones à faible trafic, donnant la priorité aux piétons et aux cyclistes pour réduire la pollution et fournir plus d’espaces verts.
Le nouveau plan couvrira 21 rues et comprendra 21 nouveaux espaces pour piétons aux intersections. Chaque rue sera ombragée à 80 % par des arbres en été et 20 % d’entre elles ne seront pas pavées. Un concours public en mai 2021 décidera du design final.
L’objectif du plan est de garantir qu’aucun résident ne se trouve à plus de 200 mètres d’un espace vert.
La création d’espaces verts urbains de ce type présente de nombreux avantages. Ils permettent d’améliorer la qualité de l’air et de diminuer le niveau de bruit grâce aux rues sans voiture, et de réduire les émissions de dioxyde d’azote (NO2) provenant du trafic routier. L’exposition à un niveau élevé de NO2 peut entraîner toute une série de problèmes respiratoires.
Il a été démontré que les espaces verts améliorent la santé mentale et réduisent les risques d’obésité et de diabète, des conditions qui augmentent considérablement la vulnérabilité à la Covid-19.
La Covid-19 a rendu les arguments en faveur d’un urbanisme vert encore plus convaincants. Cependant, ces plans ont un coût.
Obstacles aux villes vertes
Les zones vertes n'ont pas que des impacts positifs. Elles pourraient entraîner une hausse des prix de l’immobilier en raison d’une demande accrue de logements. Cela peut entraîner l’embourgeoisement et le déplacement des résidents et des entreprises locales. Il faut veiller à ce que les logements restent abordables et à ce que les zones vertes urbaines ne deviennent pas des enclaves riches.
Le confinement a mis en évidence les différences dans les conditions de vie des citadins. Les initiatives vertes doivent s’adresser à tous les groupes socio-économiques et ne doivent pas exacerber les inégalités existantes.
En outre, si les centres-villes sont les zones de concentration habituelles des initiatives écologiques, les banlieues et autres zones périphériques doivent également faire l’objet d’une attention particulière. L’objectif est de réduire la dépendance au carbone dans son ensemble, et non de la déplacer d’une zone à une autre ou d’un secteur à un autre.
Le plan devrait également inclure des mesures visant à rendre les transports privés et publics totalement écologiques. Cela pourrait inclure le remplacement des systèmes de transport polluant par des véhicules à zéro émission et la mise en place de voies réservées et de stations de recharge pour les véhicules électriques.
Les villes diffèrent énormément dans leur apparence, leur forme et leur fonctionnement. Il n’existe pas de solution universelle. Si d’autres villes choisissent de suivre le modèle de Barcelone, les questions locales doivent être examinées avec soin. Les superblocs fonctionnent très bien dans un réseau de transport bien organisé comme celui du centre de Barcelone, mais toutes les villes ne disposent pas d’un tel réseau.
De nombreuses villes cherchent à prendre le virage écologique. Robsonphoto/Shutterstock
Toutefois, les principes de quartiers verts, respectueux de l’environnement, sans voiture ou à circulation limitée peuvent être adoptés dans n’importe quelle ville. Parmi les exemples de programmes, citons les quartiers à faible circulation de Londres, la ville 15 minutes à Paris, ou les plans de Manchester pour un centre-ville zéro carbone.
Lors de l’adoption de telles initiatives, il est important de garder à l’esprit les besoins quotidiens des citoyens pour éviter de leur créer plus de problèmes. Si l’on veut limiter la circulation automobile, il faut tenir compte de la disponibilité des transports publics, d’infrastructures sécuritaires pour la marche et le cyclisme ainsi que d’un réseau routier adéquat pour les services ou les livraisons essentiels.
D’importants investissements en capital sont nécessaires pour soutenir ces plans. Le plan de Barcelone devrait coûter 38 millions d’euros (59 millions de dollars canadiens). Il faudra beaucoup plus pour qu’il puisse être déployé dans un plus grand nombre de secteurs. Les villes des pays émergents ou plus pauvres ne peuvent pas se permettre de telles sommes. En outre, la Covid-19 a laissé plusieurs villes accablées par une énorme dette.
Les initiatives en faveur des villes vertes doivent s’inscrire dans le long terme et être créées avec le soutien de la population locale. Les avantages d’un mode de vie écologique de plus en plus reconnus et les projets de développement en ce sens entraîneront des changements de comportement positifs chez les citoyens.
Anupam Nanda, Professor of Urban Economics & Real Estate, University of Manchester
La version originale de cet article a été publiée sur La Conversation.
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