Les villes, boucliers contre la pluie et les orages
On sait que les métropoles du monde ont le pouvoir de créer leurs propres précipitations, notamment en raison du phénomène d’îlots de chaleur. Et si je vous disais que les villes ont aussi la capacité de « détruire » des cellules… comme si elles agissaient comme boucliers contre les orages.
Premièrement, ce ne sont pas toutes les villes qui peuvent changer la configuration de cellules de pluie ou même d’orages. Plus la zone urbaine est vaste, plus le phénomène d’îlots de chaleur s’intensifie et plus la masse d’air au-dessus de la métropole se réchauffe. À la base, le phénomène survient en raison des mêmes configurations atmosphériques que lorsqu’une ville parvient à créer de la pluie.
10 ans d’observations minutieuses
Selon Dev Niyogi, professeur à l’université du Texas à Austin (dans une étude publiée par l’Université Purdue), les villes d’une superficie de 25 km et plus sont celles où la séparation des cellules orageuses s’observe davantage. Il est arrivé à cette conclusion (et plusieurs autres!) en observant le comportement des systèmes de passage au-dessus de la ville d’Indianapolis, entre 2000 et 2009. À l’époque, Niyogi agissait également à titre de climatologue de l’État de l’Indiana. Au fil d’une décennie, il a remarqué un comportement étrange : dans 60 % des cas, les cellules orageuses apportées par un front froid en journée, donc qui se déplacent en ligne bien organisée, se scindent graduellement en zone urbaine, puis se reforment en aval de la ville.
À ce moment, les cellules sont moins organisées, plus petites et plus nombreuses. Selon Niyogi, il s’agit d’indices tangibles qui prouvent qu’une division est survenue. De plus, toujours selon cette même étude, les zones rurales observent aussi ce phénomène. Toutefois, il est survenu seulement dans 25 % des cas.
C’est que les îlots de chaleur davantage présents en ville créent une grande différence de températures avec les masses d’air environnantes. Ainsi, il y a une différence de pression, à la fois à la surface et en altitude. Cette configuration-là génère un mouvement d'air horizontal qui peut modifier les orages qui foncent sur une ville.
Chaque ville est bien particulière
Oui, même Montréal peut servir de bouclier face aux orages. Toutes les villes du monde ont ce potentiel. Toutefois, il ne faut pas s’arrêter là. D’autres éléments peuvent contribuer à changer la configuration des lignes d’orages. Prenons l’exemple de Montréal. Notre journaliste, Rosalie Dion, s’est penchée sur la question en 2022. Rappelons que cet été-là, les orages semblaient éviter Montréal plus souvent qu’autrement.
Le cas de notre métropole diffère de celui d’Indianapolis, notamment en raison de la présence de plans d’eau. Selon Nicolas Lessard, météorologue à MétéoMédia, la présence de la rivière des Outaouais et du fleuve Saint-Laurent contribuerait à canaliser et à rediriger l’air de selon les courants d’eau. Ainsi, certains ingrédients sont absents pour qu’un soulèvement survienne et que les orages se forment. Il s’agit seulement d’un hypothèse pour l’instant. Des études plus poussées sont nécessaires afin de déterminer la cause principale de la division des orages au-dessus de Montréal.
À VOIR ÉGALEMENT : Les feuilles des arbres tournent avant l'orage, mythe ou réalité?