Les éclipses provoquent des comportements bizarres chez les animaux
Ces cycles réguliers et rythmiques durant le jour leurs dictent quand s’alimenter, dormir, migrer et s’accoupler.
Les animaux le détectent à partir du nombre d’heures de clarté qui les entoure. Mais les cycles lunaires jouent aussi un rôle important dans leur comportement.
La période synodique de la Lune - le temps qu'il lui faut pour revenir à la même position, de pleine lune à pleine lune – occasionne des changements dans le champ magnétique de la terre, l’attraction gravitationnelle de la lune sur la terre et les niveaux de lumière la nuit.
Plusieurs espèces le détectent et s’en servent pour synchroniser leur accouplement.
La ponte de coraux massive libère des dizaines de millions d’œufs d’un coup sur les récifs de corail pour coïncider avec la pleine lune ou la nouvelle lune. Mais qu’arrive-t-il aux animaux lorsque le Soleil ou la Lune se comporte de façon inhabituelle ou inattendue, comme cela se produit lors d’une éclipse?
Un corail (Acropora Millepora) libère un paquet d’œufs et de sperme au moment de la ponte annuelle dans la Grande barrière de corail, à la suite de la pleine lune à la fin novembre. Coral Brunner/Shutterstock
Éclipse solaire
Parmi tous les événements cosmiques, ce sont les éclipses solaires qui provoquent les plus grands changements de comportement chez les animaux. Ceux normalement actifs le jour sont tellement perturbés qu’ils retournent dans leur territoire nocturne; les animaux nocturnes pensent qu’ils ont trop dormi.
Une éclipse solaire a lieu quand le Soleil et la Lune sont alignés dans le même axe de façon telle que la Lune bloque totalement le Soleil. Partout sur la planète, des comportements bizarres se produisent pendant que les gens sont occupés à regarder l’éclipse.
Certaines espèces d’araignées commencent à démonter leur toile durant une éclipse, ce qu’elles font normalement à la fin de la journée. Une fois l’éclipse terminée, elles la remontent, probablement contrariées par le manque de repos entre les deux opérations. De la même manière, les oiseaux et poissons actifs durant le jour vont se reposer, alors que les chauves-souris sortent, apparemment trompées par la noirceur soudaine.
Au Zimbabwe, on a vu des hippopotames quitter leurs rivières durant une éclipse en direction des terres sèches où ils se nourrissent le soir. A mi-chemin, l’éclipse est passée et les hippopotames, échouant dans leurs efforts, ont paru agités et stressés durant le reste de la journée.
Quitter en toute hâte. Jez Bennett/Shutterstock
La Lune
Une éclipse lunaire se produit lorsque la Lune, la Terre et le Soleil sont étroitement alignés, la Terre positionnée entre les deux astres. Alors que la Lune passe directement derrière nous, la Terre empêche la lumière solaire de l’atteindre, faisant ainsi apparaître une lueur rougeâtre. Comme ces « Lunes de Sang » se produisent seulement au moment de la pleine lune, il est difficile de distinguer les effets que l’éclipse lunaire a sur les animaux des effets d’une pleine lune normale.
Selon une étude réalisée en 2010, les ouistitis de l’Azara – des singes nocturnes – en Argentine ont arrêté de se nourrir durant une éclipse lunaire, quand leur univers a commencé à s’assombrir. Ils ont dû avoir du mal à voir leur nourriture ou se sont sentis trop déstabilisés pour être en mesure de se déplacer de façon sécuritaire entre les arbres.
Ces singes nocturnes cessent de se nourrir lors des éclipses lunaires. Rich Hoyer/Flickr, CC BY
Environ trois fois par année, une « super lune » apparaît. Ce phénomène se produit lorsque la pleine lune coïncide avec le périgée – lorsque le point de l’orbite de la Lune est à une distance minimale de la Terre. La distance varie au cours du mois, parce que l’orbite de la Lune ne forme pas un cercle parfait. Durant le périgée, la Lune est de 46 000 kilomètres plus proche de la Terre que lors de l’apogée, le moment où elle est le plus loin de la terre.
Lors de la « super lune », les niveaux de lumière le soir sont 30% plus élevés que le moment le lumineux du cycle lunaire, et la Lune paraît plus grosse dans le ciel. Lors d’une recherche que nous avons réalisée récemment, les oies bernaches ont réagi à cette occurrence de « super lune » lorsqu’elles ont passé l’hiver dans le sud-ouest de l’Écosse. Nous avons installés des dispositifs sur ces oiseaux afin de mesurer leur comportement et avons observé que lors de la nuit de ces « super lunes », leur rythme cardiaque et leur température corporelle avaient augmenté, alors qu’en temps normal, elles auraient été plus paisibles.
Les oies bernaches ne réagissaient pas aux « super lunes » lorsque la Lune était recouverte de nuages épais et que la nuit restait très obscure. À l’instar des humains, il semble que la lumière vive les ait réveillées, et fait grimper leur rythme cardiaque et température corporelle afin de les préparer à affronter le jour.
Les lunes sanglantes – malgré leur appellation menaçante – ne suscitent pas de réaction chez les oies bernaches. Justinas Vitkus/Shutterstock
Le cycle lunaire et nous
Durant des siècles, les gens ont été fascinés par la relation entre le cycle lunaire et le comportement humain. Nombre de fables et de légendes y sont associées, comme celle du loup-garou, bête mythique. Il ne faut pas se surprendre que le terme « lunatique » - du mot latin « lunaticus », signifiant venant de la Lune – ait été utilisé autrefois pour décrire des gens que l’on croyait fous, malades mentaux, imprévisibles ou distraits, jusqu’à ce que l’on trouve des termes plus appropriés à partir des années 1930.
On croyait que le cycle lunaire influençait une gamme de changements étranges à survenir dans la physiologie d’une personne et que des comportements sociaux comme le taux de natalité, la fertilité, l’épilepsie, les querelles étaient aussi sous son effet. Il y a encore beaucoup de gens qui croient que les crimes violents et le désordre général augmentent au moment de la pleine lune.
Une séries de recherches effectuées vers la fin des années 1980 n’ont trouvé aucun lien entre le cycle lunaire et le comportement humain. L’influence de la lune sur nous pourrait bien relever de la légende, mais la confusion qu’elle sème chez les animaux est bien réelle.
Steve Portugal, Reader in Animal Biology and Physiology, Royal Holloway
La version originale de cet article a été publiée sur La Conversation.