Les icebergs, grands absents de l'été à l'est du Canada
Mai et juin sont généralement synonymes d'icebergs magnifiques qui circulent non loin des côtes de Terre-Neuve-et-Labrador. Toutefois, ce spectacle est absent cette année, et la température de l'eau plus élevée qu'à l'habitude est la grande coupable.
Les icebergs, généralement en provenance du Groenland, sont légion à cette période de l'année au large des côtes de Terre-Neuve. Ils peuplent le paysage et perdent parfois des pans entiers, qui s'effondrent dans l'eau dans un fracas ahurissant.
Toutefois, 2021 est différente. Aucun glacier n'a tranquillement flotté dans les eaux canadiennes pour la première fois depuis des années. Cette année pourrait même se tailler une place de choix dans le palmarès des années les moins riches en glace des trois dernières décennies. À peine 2,2% des glaces qu'on observe généralement à la fin avril n'étaient présentes cette année.
La dernière fois que Terre-Neuve-et-Labrador a observé des taux de glace aussi bas, c'était un 2010. Même son de cloche dans le golfe du Saint-Laurent, qui a également connu sa couverture de glace la plus faible en 2009-2010.
Selon le chercheur en glaciologie à la Memorial University Lev Tarasov, dans une entrevue accordée à CBC, les glaciers prennent des centaines, voire des milliers d'années, à se former au Groenland. Toutefois, pour voir des icebergs près des côtes canadiennes, ces derniers doivent se terminer au-dessus de l'océan. Au fur et à mesure que la couverture de glaces diminue au Groenland, il est donc envisageable de voir une augmentation des icebergs (en raison de la fonte accélérée) avant que ces derniers ne deviennent graduellement qu'un souvenir.
Comment expliquer ce phénomène ?
Deux facteurs climatiques régissent la présence de glaces dans l'est du pays : l'orientation des vents, et les températures moyennes pendant l'hiver, selon Environnement et Changements climatiques Canada.
L'hiver exceptionnellement doux qu'a connu Terre-Neuve-et-Labrador joue un rôle de premier plan dans cette tendance. Le blocage atmosphérique au-dessus du Groenland a permis à un air plus tiède que d'habitude de s'infiltrer sur une bonne partie de l'est du Canada, et Terre-Neuve-et-Labrador ne fait pas exception. À titre d'exemple, la ville de Saint-John's a enregistré un mercure de 2,4 °C supérieur aux normales saisonnières au cours de la saison hivernale 2020-2021.
En ce moment, les eaux de la côte est sont également plus chaudes qu'à l'habitude, surpassant entre 1 et 5 °C la température de surface normale de l'océan Atlantique. Ces éléments ont donc contribué à la fonte des icebergs, avant que ceux-ci ne puissent se rendre aux côtes terre-neuviennes.
Un autre facteur à prendre en considération : les vents. Ceux en provenance de l'ouest au nord sont généralement froids et secs, alors que ceux qui proviennent de l'ouest au sud au nord-est sont doux et humides (et favorisent la fonte des glaces). Le blocage atmosphérique au-dessus du Groenland a favorisé un apport en vents du sud, ce qui a également pu avoir une influence.
La fonte varie cependant d'année en année : une couverture plus faible en 2021 ne signifie pas une disparition totale des glaces l'année suivante. Il est toutefois plausible que les glaces sont de moins en moins présentes de manière globale au cours des décennies à venir en raison de l'augmentation des températures.