Catastrophe de Fukushima : un million de tonnes d'eau contaminée à la mer
La première évacuation d'eau contaminée aura lieu dans environ deux ans, ce qui donnera à l'opérateur japonais chargé du projet le temps de commencer à filtrer l'eau afin d'éliminer les isotopes nocifs, de construire des infrastructures et d'obtenir l'approbation réglementaire. Le Japon a fait valoir que cette initiative était nécessaire pour poursuivre le démantèlement complexe de l'usine après qu'elle a été paralysée par un tremblement de terre et un tsunami en 2011. Les autorités japonaises affirment que de l'eau filtrée de la même manière est régulièrement rejetée par les centrales nucléaires du monde entier. Pour l'heure, 1,3 million de tonnes d'eau contaminée sont stockées dans d'énormes réservoirs pour un coût annuel d'environ 912,66 millions de dollars.
Cette décision intervient environ trois mois avant les Jeux Olympiques de Tokyo, possiblement reportés en raison de la pandémie de COVID-19, dont certaines épreuves doivent se tenir à 60 km de la centrale nucléaire.
Les spécialistes japonais prévoient de filtrer l'eau contaminée pour éliminer les isotopes, ne laissant que le tritium, un isotope radioactif de l'hydrogène difficile à séparer de l'eau. L'eau sera ensuite diluée jusqu'à ce que les niveaux de tritium descendent en dessous des limites réglementaires, avant de la rejeter dans l'océan à l'aide d'une pompe. Le tritium est considéré comme relativement inoffensif car il n'émet pas assez d'énergie pour pénétrer la peau humaine. D'autres centrales nucléaires dans le monde déversent d'ailleurs régulièrement de l'eau avec de faibles niveaux d'isotope dans l'océan.
Photo de vignette et d'archive : une vue aérienne montre les réservoirs de stockage de l'eau contaminée dans la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi, détruite par le tsunami en 2011, dans la ville d'Okuma, préfecture de Fukushima, Japon - 13 février 2021 (Kyodo / via REUTERS)
Inquiétude des pays voisins
Cette décision du Japon a été qualifiée par la Chine de "complètement irresponsable", tandis que la Corée du Sud a convoqué l'ambassadeur du Japon à Séoul pour lui faire part de son inquiétude. Le ministère chinois des affaires étrangères a même ajouté dans un communiqué sur son site Internet que "cette action portera gravement atteinte à la santé et à la sécurité publique internationale, ainsi qu'aux intérêts vitaux des habitants des pays voisins".
De leur côté, les syndicats de pêcheurs de Fukushima ont exhorté pendant des années le gouvernement japonais à ne pas rejeter l'eau contaminée dans l'océan, arguant que cela aurait un impact catastrophique sur leur industrie. Les autorités ont rétorqué que les communautés de pêcheurs et autres personnes souffrant de préjudice à leur réputation en raison de la l'évacuation de l'eau seront indemnisées.
Un article de Scientific American rapportait pourtant en 2014 que l'ingestion de tritium pouvait augmenter les risques de cancer, alors que certains experts s'inquiètent aussi de la présence d'autres contaminants dans l'eau, comme les quantités importantes d'isotopes nocifs. Ils préféreraient que les contaminants radioactifs autres que le tritium restent sous contrôle dans les réservoirs de stockage. D'après eux, ces autres contaminants présentent un plus grand risque sanitaire que le tritium et s'accumulent plus facilement dans les fruits de mer et les sédiments des fonds marins.
Le gouvernement japonais a de son côté insisté sur les processus de filtrage et de dilution de l'eau. Un haut responsable des affaires publiques du gouvernement a d'ailleurs envoyé un courrier électronique aux médias lundi pour demander que le terme "contaminé" ne soit plus utilisé dans les articles de presse et les reportages, arguant qu'il était trompeur.